La COP29 a abouti à des résultats controversés, mettant en lumière la complexité de la diplomatie climatique mondiale. Parmi les avancées majeures figure la finalisation de l’Article 6 de l’Accord de Paris, un cadre clé régissant les marchés internationaux du carbone. Bien que salué comme un tournant pour la coopération internationale, ce mécanisme soulève des préoccupations quant aux pièges potentiels des marchés du carbone dans leur forme actuelle. Ces développements, accompagnés de débats persistants sur le financement climatique et la transition énergétique, soulignent l’urgence d’une action climatique audacieuse, équitable et contraignante.
Financement climatique : combler les lacunes persistantes
Le financement climatique a été au cœur des débats de la COP29. Les négociations ont porté sur le Nouvel Objectif Quantifié Collectif (NCQG), destiné à remplacer l’engagement annuel de 100 milliards de dollars arrivé à échéance en 2020. Les pays en développement ont exigé au moins 1 300 milliards de dollars par an d’ici 2035 pour répondre aux coûts croissants de l’adaptation et de l’atténuation climatiques. Ils auront peut être à se partager 300 milliards de dollars annuels à court terme, si tant est que les donateurs remplissent leurs engagements.
Malgré ces avancées modestes, l’accord n’a globalement pas répondu aux attentes exprimées. Les mécanismes de financement proposés ont été critiqués pour leur manque de clarté et l’absence de garanties contraignantes visant à mobiliser des ressources suffisantes des secteurs public et privé. Les nations vulnérables et les ONG ont exprimé leur frustration face à l’incapacité à résoudre les inégalités systémiques en matière de responsabilité climatique, insistant sur la nécessité pour les pays développés de fournir un soutien robuste et transparent.
Marchés du carbone : des garanties face à la controverse
Un résultat clé de la COP29 a été l’adoption tant attendue des règles de l’Article 6, visant à réglementer les marchés du carbone et à éviter les écueils des systèmes précédents, comme celui du Protocole de Kyoto. Les marchés du carbone, sur le papier, promettent une efficacité accrue, permettant aux pays développés de compenser leurs émissions en finançant des projets dans les pays en développement. Toutefois, les scandales liés à des programmes frauduleux ou inefficaces ont suscité une forte méfiance.
Pour répondre à ces préoccupations, l’Article 6 introduit plusieurs garde-fous :
- Éviter la double comptabilisation : Les pays vendeurs doivent déduire les crédits échangés de leurs propres objectifs climatiques, garantissant que les réductions d’émissions ne soient comptabilisées qu’une seule fois.
- Réductions réelles des émissions : Selon l’Article 6.4, 2 % des crédits générés par de nouveaux projets doivent être mis de côté pour réduire les émissions mondiales de manière tangible.
- Financement pour les nations vulnérables : 5 % des revenus des transactions de l’Article 6.4 iront au Fonds d’adaptation des Nations Unies pour aider les pays en développement à faire face aux impacts climatiques.
Malgré ces mesures, des failles subsistent. Les critiques pointent le manque de contrôle contraignant, en particulier dans l’Article 6.2, pour vérifier l’authenticité des réductions d’émissions. Par ailleurs, le risque de crédits non additionnels reste préoccupant, jusqu’à 900 millions de crédits issus du marché du Protocole de Kyoto étant éligibles pour être transférés dans le nouveau système.
Transition énergétique : progrès limités et frustrations croissantes
La transition énergétique, pilier de l’action climatique, a enregistré des avancées limitées à la COP29. Les discussions ont poursuivi les engagements de la COP28, où les pays avaient promis de réduire progressivement l’utilisation du charbon et des autres combustibles fossiles. À Bakou, les négociateurs ont réaffirmé ces engagements sans établir de calendriers ou de mécanismes d’application concrets.
Cette hésitation reflète la résistance des grands exportateurs de combustibles fossiles qui ont réussi à s’opposer à des contrôles plus stricts. Pendant ce temps, les petites nations et l’Union européenne ont plaidé pour des mesures plus audacieuses, soulignant la nécessité urgente d’aligner les politiques énergétiques mondiales sur les objectifs climatiques. Les critiques soutiennent que les marchés du carbone, et le manque d’objectifs portés sur l’abandon d’énergies fossiles , permettent in fine aux pollueurs d’acheter des compensations au lieu de réduire les émissions localement.
Conclusion
La COP29 a marqué des progrès, mais aussi des opportunités manquées dans l’agenda climatique mondial. L’adoption des règles de l’Article 6 et les avancées modestes en matière de financement climatique démontrent le potentiel de la coopération internationale. Cependant, les lacunes des mécanismes des marchés du carbone et la résistance persistante à la transition énergétique soulignent les défis à relever pour traduire les ambitions en actions concrètes.
Alors que la communauté internationale se tourne vers la COP30, le format de ces négociations est à bout de souffle. Place avant tout donc à la mise en œuvre. Une supervision plus stricte, une transparence accrue et un engagement collectif en faveur de la décarbonation sont toutefois essentiels pour combler l’écart entre promesses et réalités. Ksapa reste engagé dans la conception et le déploiement de programmes évolutifs visant à accélérer la décarbonation tout en plaçant la transition juste au cœur de ses approches :
- Ksapa travaille dans le cadre d’un protocole d’accord avec plusieurs gouvernements. Cela permet de concevoir et de déployer des programmes concrets qui accélèrent la décarbonisation grâce au financement climatique, tout en tenant compte des intérêts et des perspectives des pays bénéficiaires, en étroite collaboration avec divers organismes publics nationaux.
- En outre, Ksapa organise et dirige des activités d’engagement des parties prenantes, en utilisant des outils spécifiques pour s’assurer que les franges les plus vulnérables des communautés locales soient correctement prises en compte, afin d’organiser des schémas territoriaux de transition juste.
- Enfin, Ksapa déploie une gamme de programmes destinés à stimuler la génération de revenus locaux, à renforcer la résilience et à permettre aux acteurs locaux de s’adapter aux nouvelles conditions climatiques locales. Tout le capital à mobiliser ne peut pas provenir seulement de la finance internationale. Plus la finance climatique stimule une économie locale plus résiliente et adaptée aux contraintes climatiques, plus les pays bénéficiaires peuvent rendre la transition socialement acceptable, ce qui est l’un des facteurs de succès d’une transition climatique efficace.
Pour en savoir plus : contact@ksapa.org
Photo libre fournie par le site officiel COP 29 Media Gallery
Auteur de différents ouvrages sur les questions de RSE et développement durable. Expert international reconnu, Farid Baddache travail à l’intégration des questions de droits de l’Homme et de climat comme leviers de résilience et de compétitivité des entreprises. Restez connectés avec Farid Baddache sur Twitter @Fbaddache.