La récente publication de la « Déclaration de New York sur la conscience animale » a marqué un tournant important dans la manière dont les chercheurs et la société considèrent la conscience des animaux. Signée par 287 philosophes, éthiciens, éthologistes et neurobiologistes, cette déclaration met en lumière la possibilité réaliste que tous les vertébrés et de nombreux invertébrés possèdent une forme de conscience. Dans de nombreux secteurs comme l’agroalimentaire, la santé, le luxe, les cosmétiques ou le textile les questions du rapport de la recherche et de l’utilisation de produits tirés ou dérivés d’animaux au sens large est partie intégrante des modèles d’affaires. Miel, produits laitiers, peaux, enzymes, colorants… L’intégration d’un principe de précaution concernant la conscience animale pourrait mener à une évolution des pratiques dans les laboratoires, dans les entreprises et dans les choix des investisseurs les plus éthiques.
La Conscience des Invertébrés et la Réglementation
Depuis la première réglementation européenne sur les animaux de laboratoire en 1986, des évolutions significatives ont eu lieu. En 2010, la directive européenne a inclus les céphalopodes suite à des études montrant leurs capacités cognitives. Les crustacés décapodes pourraient être les prochains sur la liste. Ces évolutions législatives sont basées sur des données scientifiques solides et nécessitent une réévaluation constante de la conscience animale. A noter tout spécifiquement :
- Les Capacités Cognitives des Invertébrés Les recherches montrent que les insectes, comme les abeilles, possèdent des capacités cognitives avancées. Par exemple, les abeilles peuvent appliquer des règles abstraites à de nouvelles situations et maîtriser le concept de zéro. Ces découvertes suggèrent que ces petits cerveaux abritent des processus cognitifs de haut niveau.
- Test de Conscience et Biais Humains Les tests de conscience traditionnels, comme le test de la reconnaissance du miroir, peuvent être biaisés par notre perception humaine. Les recherches récentes montrent que certaines espèces, précédemment considérées comme n’ayant pas de conscience de soi, peuvent passer ces tests. Cela nécessite de réévaluer nos conclusions sur la conscience animale.
- Impacts sur l’Éthique en Laboratoire La reconnaissance de la conscience chez les insectes et autres invertébrés pourrait mener à des changements significatifs dans les pratiques de recherche. Des recommandations pour les décapodes et les insectes ont été rédigées pour définir des normes d’hébergement et de mise à mort. Si ces animaux étaient inclus dans la directive européenne, les chercheurs devraient suivre des formations spécifiques, ce qui améliorerait à la fois l’éthique et la qualité de la recherche.
Pratiques de Recherche et Responsabilité Environnementale
Cette déclaration de New York engage un processus collectif qui invite chercheurs, pouvoirs publics, et acteurs économiques (entreprises, partenaires financiers) à reconsidérer leurs pratiques. En effet, cette déclaration interroge les pratiques et l’acception actuelle dominante en matière de prise en compte de la conscience animale à 3 niveaux :
- Évolution des Pratiques de Recherche Les pratiques de recherche doivent évoluer pour prendre en compte la conscience animale. Les protocoles peuvent être adaptés pour réduire le nombre d’animaux utilisés et améliorer leur bien-être. Par exemple, l’utilisation de chocs électriques pour étudier la mémoire aversive chez les abeilles a été réduite et d’autres actions ciblées sont à envisager.
- Éthique et Bien-être Animal La prise en compte de la conscience animale pose des questions éthiques sur l’élevage d’insectes comme source de protéines. Les recherches montrent que des doses sublétales de pesticides provoquent des lésions cérébrales chez les abeilles, soulignant l’importance d’évaluer l’impact des pratiques humaines sur les insectes.
- Responsabilité Environnementale La déclaration de New York appelle à une réflexion plus large sur notre responsabilité envers les animaux au sens large, et l’environnement. Cette réflexion s’inscrit dans le cadre du mouvement One Health, qui reconnaît l’interconnexion entre la santé animale, des écosystèmes et humaine. Il est crucial de comprendre et de minimiser les dommages causés aux insectes et autres animaux, car cela affecte la biodiversité et les écosystèmes dont dépend notre survie.
Conclusion
La déclaration de New York sur la conscience animale représente un appel à repenser nos relations avec les animaux et l’environnement. En reconnaissant la possibilité de la conscience chez une grande variété d’animaux, cette déclaration incite à des changements éthiques et pratiques dans la recherche, l’élevage et la protection de l’environnement. Elle souligne l’importance de traiter tous les êtres vivants avec respect et de prendre en compte leur bien-être dans nos décisions. Ksapa travaille au quotidien sur les questions éthiques à intégrer dans différentes réflexions de recherche et développement – technologies responsables par exemple, dans l’élaboration de consensus entre parties prenantes sur les bonnes pratiques environnementales et sociales acceptables dans un temps donné. Ksapa peut travailler à vos côtés pour prendre en compte ces nouvelles réflexions et leurs implications dans la stratégie et les modes opératoires opérés par vos organisations.
Auteur de différents ouvrages sur les questions de RSE et développement durable. Expert international reconnu, Farid Baddache travail à l’intégration des questions de droits de l’Homme et de climat comme leviers de résilience et de compétitivité des entreprises. Restez connectés avec Farid Baddache sur Twitter @Fbaddache.