Ces dernières années, de nombreuses réglementations relatives aux entreprises, aux droits de l’homme et à la protection de l’environnement sont entrées en vigueur. En tant que principaux responsables des droits de l’homme, les gouvernements de différents pays ont adopté des réglementations pour un approvisionnement responsable. Ces réglementations existent au niveau régional, international et national. Outre la loi britannique sur l’esclavage moderne, la loi française sur le devoir de diligence et la récente proposition de directive européenne sur le devoir de diligence des entreprises, l’Allemagne a également adopté sa loi sur les obligations de diligence des entreprises dans les chaînes d’approvisionnement (Lieferettensorgfaltspflichtengesetz-LkSG) ou GSCA en juin 2021. Selon le ministère fédéral allemand du travail et des affaires sociales, c’est par le biais de la loi sur les chaînes d’approvisionnement que, pour « la première fois, la responsabilité des entreprises allemandes en matière de respect des droits de l’homme dans les chaînes d’approvisionnement mondiales a reçu une assise juridique ». La loi est entrée en vigueur le 1er janvier 2O23. Son principal objectif est d’assurer une gestion efficace des risques liés aux droits de l’homme et à l’environnement, ainsi que des impacts négatifs relatifs tout au long de la chaîne d’approvisionnement. La loi impose des obligations de diligence raisonnable à la fois similaires et nouvelles par rapport aux législations déjà existantes dans ce domaine.
1. Champ d’application de la loi allemande sur la chaîne d’approvisionnement
Le GSCA couvre les entreprises basées en Allemagne ou les entreprises étrangères ayant des filiales enregistrées en Allemagne. Ces entreprises doivent avoir au moins 3000 employés pour les deux derniers exercices en Allemagne. Le seuil de 3000 employés sera réduit pour couvrir les entreprises de 1000 employés à partir de 2024. La loi sur la chaîne d’approvisionnement ne s’applique normalement qu’aux entités du secteur privé, mais elle s’étend également aux entités publiques (c’est-à-dire aux sociétés, fondations et institutions de droit public) lorsqu’elles exercent des activités commerciales sur le marché.
En ce qui concerne l’étendue des activités, la loi réglemente tous les produits ou services de l’entreprise, depuis l’approvisionnement jusqu’à la livraison finale du produit ou du service, jusqu’à ce qu’il atteigne le client final. Selon la zone d’influence de l’entreprise, les entreprises doivent remplir des obligations de diligence raisonnable en ce qui concerne :
- leur propre domaine d’activité,
- les actions des partenaires contractuels, et
- les actions des autres fournisseurs (indirects).
Mais la loi s’applique aussi indirectement et officieusement aux entreprises qui n’atteignent pas le seuil de 3000 employés (ou 1000 employés à partir de 2024) lorsqu’elles jouent le rôle de fournisseur direct ou indirect. En effet, dans le cadre des obligations de diligence raisonnable, la loi impose aux entreprises qui entrent dans son champ d’application d’intégrer leurs politiques de diligence raisonnable dans leurs relations contractuelles. Mais toutefois, les petites et moyennes entreprises n’ont aucune responsabilité en matière de conformité aux exigences de la Loi. Contrairement aux entreprises entrant dans son champ d’application, les PME ne peuvent pas être pénalisées en conséquence de la loi sur la chaîne d’approvisionnement.
2. Les obligations de due diligence découlant de la loi allemande sur le devoir de vigilance
Les obligations de diligence raisonnable des entreprises découlant de la GSCA s’inspirent des lignes directrices de l’OCDE sur l’approvisionnement responsable. Elles sont également similaires aux règlements susmentionnés. La loi impose aux entreprises de mettre en place un système de gestion des risques approprié et efficace, intégré à tous les processus commerciaux pertinents. Un système de gestion des risques est considéré comme « efficace » lorsque les risques liés aux droits de l’homme et à l’environnement sont identifiés, atténués, minimisés et éliminés.
Les obligations de diligence raisonnable exigent en pratique ce qui suit :
- la mise en place d’un système de gestion des risques
- la désignation d’une ou plusieurs personnes responsables au sein de l’entreprise
- la réalisation d’analyses régulières des risques
- la publication d’une déclaration de politique générale
- l’établissement de mesures préventives dans le domaine d’activité de l’entreprise, vis-à-vis des fournisseurs directs et – si des indices laissent supposer une possible violation des droits de l’homme – vis-à-vis des fournisseurs indirects
- prendre des mesures correctives
- établir des mécanismes de réclamation
- documentation et rapports
3. Valeur ajoutée de la Loi sur la chaîne d’approvisionnement par rapport aux autres réglementations
Une distinction essentielle entre la loi allemande sur la chaîne d’approvisionnement et la proposition de directive de l’UE sur le devoir de diligence réside dans leurs modalités d’application. En effet, la CS3D s’applique à un niveau individuel pour déterminer le seuil du nombre d’employés. La directive européenne s’applique aux entreprises de l’UE comptant plus de 500 employés et réalisant un chiffre d’affaires net de 150 millions d’euros. Elle s’applique également aux entreprises de l’UE employant plus de 250 personnes et réalisant un chiffre d’affaires net de 40 millions d’euros dans six secteurs à haut risque. Pour les entreprises non européennes, le critère d’éligibilité est un chiffre d’affaires net de 150 millions d’euros dans l’UE ou de 40 millions d’euros dans les secteurs à haut risque. En ce qui concerne les modalités d’application proprement dites, alors que la CS3D s’applique au niveau individuel, le Supply Chain Act, comme la loi française sur le devoir de diligence, s’applique au niveau du groupe. En effet, dans le cadre du GSCA, le calcul pour déterminer les seuils d’employés prend en compte tous les employés qui travaillent en Allemagne dans toutes les sociétés, succursales ou divisions liées, même lorsque les entités sont enregistrées comme des sociétés distinctes. Il prend également en compte les salariés indépendamment de la forme des contrats de travail. Elle concerne aussi bien les salariés à temps plein que les salariés à temps partiel (si la période d’emploi est d’au moins six mois).
Un deuxième point de distinction avec la CS3D réside dans le champ d’application. Alors que la CS3D laisse aux États membres la liberté d’inclure les institutions financières et les investissements dans le champ d’application de la directive au niveau national, la loi sur la chaîne d’approvisionnement s’applique à toutes les entreprises répondant au critère du nombre d’employés mentionné ci-dessus.
Par rapport à la loi française sur la diligence raisonnable, la valeur ajoutée de la loi sur la chaîne d’approvisionnement est la possibilité d’imposer des amendes aux entreprises concernées en cas de non-respect. En effet, alors qu’une telle possibilité était exclue dans la législation française, le GSCA prévoit les sanctions suivantes :
- des amendes pouvant aller jusqu’à 800 000 euros,
- dans le cas d’entreprises dont le chiffre d’affaires annuel est supérieur à 400 millions d’euros, des amendes pouvant aller jusqu’à 2 % du chiffre d’affaires mondial,
- jusqu’à trois ans d’exclusion des marchés publics si une amende d’au moins 175 000 euros a été infligée.
La possibilité de pénalisation prévue par la loi sur la chaîne d’approvisionnement la rend plus contraignante et offre plus de garanties de mise en œuvre que la loi française sur le devoir de diligence. La CS3D inclut également la possibilité de pénalisation dans les sanctions, mais laisse la compétence aux autorités nationales. Un deuxième point de distinction est que le GSCA s’applique à toutes les entreprises sans considération de leur forme juridique, alors que la loi française sur la diligence raisonnable ne s’applique qu’aux multinationales à capitaux français ayant 5000 employés en France ou 10 000 employés dans le monde.
Conclusion: Ksapa, assemblage de méthodologies et d’expertises à même de mettre en conformité GSCA les chaînes d’approvisionnements de grands groupes industriels mondiaux
Ksapa est une initiative internationale travaillant avec nombre des principaux acheteurs européens, américains, africains et asiatiques. Ksapa accompagne ses clients à la fois dans le cadrage méthodologique identifiant les principaux risques de non conformité. Ksapa dispose également des ressources humaines, digitales et en ingénierie financière permettant de déployer des programmes dans les chaînes d’approvisionnement afin de réduire les risques à la source partout dans le monde.
François travaille chez Ksapa en tant que consultant en développement durable. Il est aussi chargé de plaidoyer et de support juridique.
Ayant éprouvé très tôt un vif intérêt pour le développement durable, François a été amené à réaliser un Master en Human Rights and Multi-level Governance à l’Université de Padoue. Il est aussi titulaire d'un Master en Droit International Economique de l'Université Paris 1 Panthéon Sorbonne. Passionnée par la thématique du développement durable, il aspire travailler à la construction d'une économie plus respectueuse des droits humains et de l'environnement.
François parle couramment le français, l’anglais, le gourmantché et le Moore.