Résoudre le problème du financement des transitions climatiques. Quid d’impliquer les bénéficiaires ?

Le financement international du climat, en particulier dans ses multiples blocages observés le long de la COP29, est confronté à des défis systémiques majeurs. Depuis l’Accord de Paris et COP21, les progrès pour financer les transitions climatiques restent décevants. Les mécanismes censés mobiliser et allouer des fonds de manière équitable et efficace sont minés par la mauvaise gestion, les incohérences et le manque de transparence. Cet enjeu est crucial, car les nations en développement, souvent les plus vulnérables aux impacts climatiques, dépendent de ce soutien financier pour s’adapter, réduire les risques et passer à des économies à faible émission de carbone. Cet article examine les raisons derrière l’inefficacité de ces financements, articulées en trois sections thématiques : lacunes systémiques, problèmes de responsabilité et opportunités de réforme.

Les lacunes systémiques du financement climatique

Le financement climatique vise à aider les pays vulnérables à atténuer et à s’adapter aux changements climatiques, mais son application souffre de graves défauts structurels. Les nations développées ne respectent souvent pas leurs engagements ou, pire encore, les remplissent par des manœuvres comptables au lieu de nouveaux investissements. Par exemple, l’engagement annuel de 100 milliards de dollars pris lors de la COP15 en 2009 n’a été respecté qu’en 2022, avec deux ans de retard. Une grande partie de cet « objectif atteint » repose sur le reclassement d’aides existantes en financement climatique, ce qui va à l’encontre du principe que ces fonds doivent être « nouveaux et additionnels ». Cette pratique prive les pays en développement de ressources véritablement nouvelles et gonfle artificiellement les accomplissements des donateurs sans apporter un soutien significatif sur le terrain.

De plus, les mécanismes de distribution sont fragmentés et inefficaces. Les fonds transitent par un réseau complexe d’accords bilatéraux, d’institutions multilatérales et de partenariats avec le secteur privé, chacun avec ses propres critères et priorités. L’absence d’un cadre unifié entraîne des chevauchements, des retards et des coûts de transaction importants, réduisant ainsi l’efficacité des fonds disponibles.

Problèmes de responsabilité et de gouvernance

Un autre problème majeur réside dans le manque de gouvernance et de responsabilité robustes dans le financement climatique. Les pays en développement ont souvent peu de contrôle sur la manière dont les fonds sont alloués et dépensés. Une part importante de ces financements est octroyée sous forme de prêts plutôt que de subventions, aggravant la dette de nations déjà économiquement vulnérables. Cela contredit le principe fondamental du financement climatique, censé compenser les pays les moins responsables du changement climatique mais les plus affectés.

La transparence constitue une autre faiblesse critique. Les nations donatrices omettent fréquemment de fournir des informations détaillées sur leurs contributions financières, laissant les bénéficiaires dans l’incertitude quant aux ressources disponibles. Par ailleurs, les différences dans les normes de rapport entre les pays donateurs et les institutions compliquent encore la compréhension de l’ampleur réelle et de l’impact des financements climatiques. L’absence d’un cadre universellement accepté pour surveiller et vérifier les flux financiers rend difficile la responsabilisation des parties prenantes ou l’évaluation de l’efficacité des projets financés.

Opportunités de progrès : Et si l’on impliquait davantage les bénéficiaires ?

Malgré ces défis, un consensus croissant émerge sur la nécessité d’une refonte systémique de l’architecture internationale du financement climatique. Tout d’abord, il est impératif de mettre en place un cadre centralisé et transparent pour suivre les flux financiers. Cela inclut la standardisation des pratiques de rapport et la vérification que tout financement climatique est réellement nouveau et additionnel, et non simplement de l’aide existante réaffectée. Ces réformes pourraient renforcer la confiance entre pays donateurs et bénéficiaires, favorisant une collaboration plus efficace.

Un autre aspect critique de la réforme consiste à revoir la composition des financements climatiques. Le passage des prêts aux subventions permettrait de réduire le fardeau de la dette des nations vulnérables et alignerait les flux financiers avec le principe de justice climatique. En outre, le renforcement du rôle des institutions multilatérales comme le Fonds vert pour le climat, doté de mandats clairs et de structures de gouvernance solides, pourrait rationaliser les processus de financement et garantir que les ressources soient dirigées là où elles sont le plus nécessaires.

Enfin, et peut-être le plus rapide et finalement prometteur : encourager une implication accrue des pays bénéficiaires dans les processus décisionnels permettrait d’améliorer l’alignement des projets sur les besoins et priorités locales. Les pays en développement sont souvent les mieux placés pour évaluer comment et dans quelle mesure le financement peut générer des bénéfices à long terme dans un contexte de défis sociaux locaux et de contraintes climatiques croissantes.

Conclusion

Le financement international du climat est à un tournant décisif à l’approche de la COP29 et de la COP30, ses lacunes étant de plus en plus critiquées. Résoudre les inefficacités systémiques, améliorer la transparence et la responsabilité, et introduire des réformes globales sont essentiels pour transformer ce secteur en un outil efficace pour l’action climatique mondiale. La voie à suivre nécessite des efforts collaboratifs de toutes les parties prenantes pour s’assurer que les fonds soutiennent véritablement ceux qui en ont le plus besoin, créant une réponse globale plus équitable et résiliente au changement climatique.

Des initiatives comme celles de Ksapa démontrent que des solutions concrètes sont possibles.

  • Ksapa aide déjà divers acteurs financiers à adapter leurs produits et leurs activités d’engagement avec les actifs et les clients afin de mieux refléter ces impératifs
  • Ksapa travaille également dans le cadre d’un protocole d’accord avec plusieurs gouvernements. Cela permet de concevoir et de déployer des programmes concrets qui accélèrent la décarbonisation grâce au financement climatique, tout en reflétant étroitement les intérêts et les perspectives des pays bénéficiaires
  • En outre, Ksapa organise et dirige des activités d’engagement des parties prenantes, en utilisant des outils spécifiques pour s’assurer que les franges les plus vulnérables des communautés locales sont correctement prises en compte, afin d’organiser des schémas territoriaux de transition équitable
  • Enfin, Ksapa déploie une gamme de programmes destinés à stimuler la génération de revenus locaux, à renforcer la résilience et à permettre aux acteurs locaux de s’adapter aux nouvelles conditions climatiques locales. Tout l’argent ne peut pas provenir de la finance mondiale. Plus la finance climatique stimulera une économie locale plus résiliente et adaptée aux contraintes climatiques, plus les pays bénéficiaires pourront rendre la transition socialement acceptable – et c’est là une des clés du succès de la transition climatique

Pour en savoir plus : contact@ksapa.org

Photo libre fournie par le site officiel COP 29 Media Gallery

Farid Baddache auteur de ce blog sur les thématique de résilience, d'impact et d'inclusion
Site Web | Autres articles

Auteur de différents ouvrages sur les questions de RSE et développement durable. Expert international reconnu, Farid Baddache travail à l’intégration des questions de droits de l’Homme et de climat comme leviers de résilience et de compétitivité des entreprises. Restez connectés avec Farid Baddache sur Twitter @Fbaddache.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *